mardi 14 décembre 2010

La diète des bûcherons

Dans Anciens chantiers du Saint-Maurice, Pierre Dupin décrit l'alimentation des bûcherons qui travaillaient dans les chantiers de la Mauricie en hiver vers 1875. Son texte a d'abord été publié dans le journal Le Bien public de Trois-Rivières en 1935.

Au déjeuner, les hommes mangeaient des beans (fèves au lard) que le "cook" avait fait cuire dans les cendres pendant la nuit. "Nourriture complète puisqu'elle renferme le féculent et la graisse."

"Pendant que les hommes déjeunent, le cuisinier, aidé de son marmiton, prépare les sacs de ceux qui, travaillant trop loin pour revenir dîner au "campe", devront collationner dans le bois. Pas de délicatesses ni de friandises pour ce repas qui n'aura rien d'un pique-nique; deux ou trois chanteaux de pain, une brique de lard bouilli, le tout roulé dans un sac de toile, et le lunch est préparé." Ils enfouiront ce repas dans la neige pour éviter qu'il gèle et le mangeront froid à la pause du midi.

Ceux qui travaillent près du camp sont plus chanceux, ils ont droit à une soupe chaude. "Pour être pris au "campe" le dîner n'en sera  ni plus riche ni plus varié. Depuis le mois d'octobre jusqu'à la fin des chantiers, le menu, toujours le même, ne variera ni d'une fève ni d'un pois; du pain et des beans le matin, de la soupe aux pois, du pain et du lard le midi... Ajoutez à cela du thé à discrétion et fort à faire flotter un clou !"

"On se tromperait grandement si on imaginait le "cook" de chantier tout de blanc vêtu, coiffé de la toque, manipulant des casseroles d'aluminium et confectionnant des sauces savantes."  Pour le décrire, Pierre Dupin cite un extrait du Tableau de la mer de Jean Taché écrit en 1732 :

Un visage enfumé, que l'on appelle coq,
Qui quitte rarement sa cuillère et son croc;
Un malpropre, un vilain, qui sans cesse se gratte,
Dont les yeux larmoyants sont bordés d'écarlate;
Qu'on voit le plus souvent les bras nus charbonnés,
Le tabac à la bouche et la roupie au nez;
Un homme qu'on prendrait pour un diable à la mine !
Cet élégant mignon préside à la cuisine.

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